Remarques d'Achim Steiner à l’occasion de l’ouverture de la Conférence de haut niveau sur la région du Lac Tchad

4 septembre 2018

L'Administrateur du PNUD Achim Steiner lors de l’ouverture de la Conférence de haut niveau sur la région du Lac Tchad à Berlin.

Remarques de l’Administrateur du PNUD Achim Steiner

à l’occasion de l’ouverture de la Conférence de haut niveau sur la région du Lac Tchad 

Ministère des Affaires étrangères

Berlin, le 3 septembre 2018

[Version preliminaire]

Vos Excellences, chers collègues, mesdames et messieurs,

Je tiens à remercier les gouvernements de l’Allemagne, du Nigéria et de la Norvège, qui organisent conjointement avec les Nations Unies cette conférence aussi importante qu’opportune sur la région du Lac Tchad. Je tiens aussi à dire notre appréciation aux gouvernements du Cameroun, du Niger et du Tchad pour notre étroit partenariat et, à l’évidence, à nos hôtes allemands qui, dans de très brefs délais, ont fait de cette conférence une réalité [sous la direction de S.E. M. Heiko Maas, ministre des Affaires étrangères].

Le fait que nous nous réunissions après la Conférence humanitaire d’Oslo de 2017 pour examiner à présent les questions relatives à l’action humanitaire, au développement et à la stabilisation nous offre une remarquable opportunité et démontre une fois encore notre attachement à une nouvelle façon de faire. Cela nous permettra de souligner le lien qui unit les interventions visant les besoins humanitaires immédiats et celles qui ciblent dans le long terme les causes sous-jacentes de la crise, ainsi que de déterminer en quoi elles sont étroitement liées à la prévention des crises et à l’établissement de la paix.

Dans cet esprit de collaboration, nous avions organisé avant la présente conférence une visite conjointe dans la région avec l’OCHA pour examiner les besoins du renforcement de la résilience.

La crise humanitaire dans le bassin du Lac Tchad est l’une des plus graves qui sévisse dans le monde, avec plus de 10 millions de personnes qui ont un besoin urgent d’aide et de protection vitales. Les causes sous-jacentes de la crise sont les fortes inégalités, l’injustice sociale perçue, le manque de prestations de services sociaux, la marginalisation historiques, l’insuffisance des possibilités économiques, les hauts niveaux de pauvreté et l’impact des changements climatiques et de la dégradation des terres. Le mouvement insurrectionnel Boko Haram et la dynamique du conflit sont venus accroître encore la vulnérabilité des populations, perturbant les moyens d’existence que sont les activités agricoles, l’élevage et la pêche, ainsi que la liberté de mouvement, le commerce et la gouvernance locale. Les enfants, et tout particulièrement les filles, sont à risque, du fait qu’ils sont choisis de façon disproportionnée pour des attaques suicides. Séduits par des idéologies religieuses, des encouragements financiers, une lueur d’espoir ou cédant à la violence, de nombreux jeunes sans avenir et se sentant marginalisés sont attirés par Boko Haram.

Des millions de gens ont été touchés par les violences de ce mouvement, des villages détruits, des foyers brisés, des proches tués. Les femmes se retrouvent souvent seules pour subvenir aux besoins de la famille. Lorsqu’il est possible d’assurer la sécurité, il faut reconstruire et remettre en place des structures qui permettent aux gens de bâtir une nouvelle existence et de se procurer des revenus. Il faut rétablir les sources sociaux, les relations et la confiance.  En bref, il est un besoin urgent de mettre en œuvre une riposte développementale de grande ampleur pour que les gens reprennent leur vie en main.

Les moyens financiers dont les gouvernements ont déterminés qu’ils étaient nécessaires pour renforcer la résilience dans la région s’élèvent à 2,3 milliards de dollars dans le moyen terme, soit une durée de 3 ans. Si ce chiffre peut à première vue paraître haut, je rappelle que nous visons les causes profondes d’une crise de grande ampleur et la nécessité de résoudre simultanément plusieurs problèmes.

Pour réduire la dépendance de l’aide humanitaire et remettre la région sur la voie du développement durable, les agents de l’action humanitaire, de la stabilisation et du développement doivent œuvrer de concert. Il sera d’une importance clé d’amplifier les interventions de développement dans la région du bassin du Lac Tchad tout en maintenant les apports d’aide humanitaire pour réduire les vulnérabilités et renforcer la résilience dans le long terme. Nous sommes convaincus que, malgré les défis opérationnels, il est possible d’investir aujourd’hui pour accroître la résilience individuelle, communautaire et institutionnelle et pour faire du Programme de développement durable à l’horizon 2030 une réalité dans la région.

Il existe, au plan national et régional, des cadres d’action pertinents. Nous œuvrons dans le contexte de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, de la Stratégie de stabilisation, de relèvement et de résilience du bassin du Lac Tchad tout récemment adoptée par l’Union africaine et la Commission du bassin du Lac Tchad, des divers plans nationaux de relèvement et de développement, ainsi que dans celui de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. Il s’agit à présent d’entreprendre la mise en œuvre de ces cadres. Le Forum des gouverneurs du bassin du Lac Tchad récemment établi devrait jouer ici un rôle crucial. Il servira de plateforme transnationale pour la coopération et l’échange et offrira un cadre de mise en œuvre au niveau local tout en promouvant la prise en compte simultanée des questions transfrontalières. Nous remercions nous hôtes allemands qui ont appuyé les instances gouvernementales par l’entremise du PNUD.

Vos Excellences, chers collègues, mesdames et messieurs,

Nous œuvrons dans le but de ne faire aucun laissé pour compte. Les défis à relever dans le bassin du Lac Tchad dépassent les frontières et les ripostes unilatérales. Nous devons, sous le leadership gouvernemental, unir nos forces et accroître notre engagement collectif. Je me rendrai dans la région le mois prochain avec Mark Lowcock pour prendre la mesure des progrès accomplis et pour envoyer un signal résolu en faveur d’une nouvelle façon d’œuvrer pour relever les défis.  

De nouveau, je remercie sincèrement les co-organisateurs et tous les partenaires qui ont encouragé cet échange axé sur l’avenir et je suis honoré de prendre part à ce débat.

Je vous remercie.